Chers frères et sœurs,Diner de Jésus en compagnie d'Emmaüs

 

Dans ma lettre de la semaine dernière, je vous écrivais que cette année j’ai vécu de très belles fêtes de Pâques, en remerciant le Seigneur. Mais je me rends compte, également, que pour certains d’entre vous, et d’après quelques témoignages, cette solennité a été vécue dans la solitude, avec un peu de tristesse.

C’est vrai que la pandémie nous oblige en ce temps, à rester enfermés dans nos maisons – et l’isolement n’est pas facile à vivre –. Il est tout aussi vrai que ce n’est pas la même chose de rester confinés tout en ayant une famille, une communauté, la compagnie de quelqu’un que l’on aime, et de vivre cette retraite forcée tous seuls, sans pouvoir communiquer et partager ses sentiments, ses joies et ses douleurs, ses idées, ses doutes… Ce n’est assurément ni facile, ni souhaitable. Mais ce n’est pas cet isolément, je crois, bien que difficile à vivre, qui seul peut nous ôter la paix, la sérénité. Il existe un isolement qui est bien plus dangereux, bien plus pernicieux que celui qui est causé par l’enfermement auquel tous nous sommes contraints en cette période : c’est la solitude ontologique, existentielle, la solitude qui a le pouvoir de nous enlever la paix et l’espérance. C’est un vrai danger celle-ci. Mais même si elle est là, elle ne représente jamais une condamnation définitive, une réalité inéluctable !

Je ne suis pas la personne la plus compétente pour vous proposer des recettes et ce n’est pas non plus ma volonté de les donner. J’espère en ce sens, que mes lettres n’apparaissent pas comme des écrits moralisateurs ou exigeants. Ce que je cherche c’est de vous donner une parole d’espérance qui puisse vous aider et m’aider en même temps, dans le cheminement de nos journées, à rechercher et retrouver, à mettre en évidence, les empreintes que le Christ laisse dans notre histoire, dans notre vie de tous les jours.

A ce propos, l’Evangile de ce 3ème dimanche de Pâques nous présente le récit des disciples d’Emmaüs. Ces deux disciples, découragés et tristes après la mort de Jésus, rentrent chez eux dans le village d’Emmaüs. La déception liée à la mort de leur maître est grande et les enferme dans la tristesse et le découragement, dans la « solitude ». Déjà ils ont reçu l’annonce de sa résurrection de la part des femmes qui font partie du cercle des intimes, mais la nouvelle est tellement étrange, tellement éloignée de la réalité qu’ils connaissent, de leur expérience, qu’ils ne peuvent pas lui donner de l’importance. Jésus ressuscité va alors à leur rencontre et en les accompagnant il les enseigne.  En marchant avec eux, indépendamment de leur conscience de cela, il les aime et les guérit. En leur ouvrant l’esprit à l’intelligence des écritures, il les console et il reste avec eux jusqu’à se faire reconnaître dans la fraction du pain.

Nous pouvons nous identifier à ces deux disciples ainsi que tous les chrétiens. Ils sont seuls, car le maître dans lequel ils mettaient leur attachement, leurs sécurités, leur confiance, n’est plus là. Ils sont en « isolement », peu importe s’ils sont deux. Il y a une solitude qui dépasse la présence d’autres personnes à nos côtés et qui a le pouvoir d’enfermer dans la tristesse. C’est cette solitude que le Seigneur ressuscité est venu détruire définitivement. Ce n’est pas toujours évident, mais Il est avec nous, jusqu’à la fin des jours. C’est lui-même qui nous l’a dit. Avec le Christ près de nous, nous ne sommes jamais seuls, même si parfois nous pouvons avoir la sensation d’être abandonnés.

Un écrit que j’ai eu l’occasion de relire ces jours-ci, attribué à Mary Steel Stevenson dont un petit extrait conclura ma lettre, met en scène une personne qui, parlant avec Jésus, lui reproche de l’avoir laissée seule en chemin dans les moments de plus grande souffrance. Voilà les dernières lignes :  » Seigneur… tu m’as dit que tu étais avec moi tous les jours de ma vie et j’ai accepté de vivre avec Toi. Mais j’ai remarqué que dans les pires moments de ma vie, il n’y avait qu’une seule trace de pas. Je ne peux pas comprendre que tu m’aies laissé seul aux moments où j’avais le plus besoin de Toi.  » Et le Seigneur répondit :  » Mon fils, tu m’es tellement précieux ! Je t’aime ! Je ne t’aurais jamais abandonné, pas même une seule minute ! Les jours où tu n’as vu qu’une seule trace de pas sur le sable, ces jours d’épreuves et de souffrances, eh bien : c’était moi qui te portais.  »

P. Giovanni

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